Article du 4 mars 2010
Christine Savioz
Sur un pont par grand vent», de Bastien Fournier, prend son envol aux Halles à Sierre ce soir. Un moment intense.
Sur la scène, un décor de cartons. Dans ces boîtes, quatre personnes dont les destins se croisent autour d'un meurtre vieux de vingt-cinq ans. A l'époque, une jeune maman avait été tuée sous les yeux de son nouveau-né, dans une maison de soeurs hospitalières. Des années plus tard, ce bébé - devenu une jeune femme épanouie (Marianne Défago) - cherche à connaître la vérité sur la disparition de sa mère.
Se faisant passer pour une journaliste, la jeune femme interroge ainsi tour à tour les quatre personnes, comme l'inspecteur qui avait mené l'enquête (Fred Mudry), une soeur hospitalière présente lors du crime (Laurence Morisot) ou encore la meurtrière elle-même (Olivia Seigne). «C'est comme si cette jeune fille fouillait les vieux souvenirs de famille au grenier. C'est pour cela que j'ai imaginé un décor de cartons», explique Mathieu Bessero, le metteur en scène.
De plus, cette scénographie permet au spectateur de passer d'un lieu à l'autre sans problème. «Les textes se disent parfois sur un pont, dans un appartement ou dans un jardin, c'était important de trouver un lieu unique pour faire exister tous ces univers», ajoute le metteur en scène.
Le texte au centre
Les quatre personnes, coincées dans leurs cartons, portent toutes des masques. L'histoire de «Sur un pont par grand vent», écrite par Bastien Fournier, prend ainsi encore plus d'ampleur. Chaque mot résonne avec force dans ce drame que le spectateur cerne peu à peu. Car tout est suggéré. Les monologues des personnages s'entrecoupent et permettent au public d'assembler les pièces du puzzle au fil de la pièce. «Le texte a cette magie de nous amener des images. Il n'y a pas beaucoup d'action. C'est la raison pour laquelle j'ai choisi une mise en scène statique, mettant le texte en valeur. C'est de l'écoute active», explique Mathieu Bessero.
Ainsi lorsque la meurtrière (Olivia Seigne) raconte la scène du crime, sans bouger, simplement en haussant la voix, le spectateur est pris par les émotions. «Pour moi, ce personnage a tué cette femme pour voler son enfant, mais aussi pour voler en quelque sorte sa belle vie, son bonheur maternel, son bonheur amoureux», souligne Olivia Seigne.
Comme un polar
La musique, composée par Julien Pouget, donne aux scènes un intéressant côté polar. «Elle colle parfaitement aux images proposées», remarque Mathieu Bessero avec raison. Une manière aussi de mettre en évidence la tragédie que les personnages revivent tous. Tragédie. C'était bien la motivation de l'auteur Bastien Fournier lorsqu'il a commencé à écrire cette pièce. «Je voulais faire quelque chose autour de la violence, mais la violence vécue au quotidien. J'ai cherché comment faire une tragédie aujourd'hui. Puis, tout s'est enchaîné», explique Bastien Fournier, ému de voir son texte interprété par des comédiens. «C'est un moment particulier de voir mes mots dans leur bouche.» Et un moment intense pour le spectateur.